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3 lignes insolites de ski de pente raide en Ubaye

Ubayenne, accompagnatrice en montagne et ambassadrice Masherbrum, Anaïs Barbeau parcourt inlassablement le massif de l’Ubaye en alpinisme et en ski à la recherche d’itinéraires sauvages. Elle nous embarque ici pour trois itinéraires insolites de ski de pente raide au cœur de son terrain de jeu du quotidien.

 

La Chalanche (2984m) – couloir Sud direct, (4.3 E2, 1500D+) : La pente raide du bassin de Barcelonnette.

Le tracé – ©Anaïs Barbeau

Depuis ma fenêtre, cette face sud me charme, me démange depuis (trop) longtemps. Encore un beau versant à quelques encablures de la maison.

Pour faire cette ligne dans de bonnes conditions il faudra trouver le bon timing ! Elle nécessite un bon remplissage pour pouvoir être skiée de haut en bas. On préférera l’entreprendre dans les mois d’hiver où l’enneigement est conséquent mais également attendre le moment où les faces sud décaillent suffisamment pour skier avec plaisir et avec le bon grip.

Le 28 janvier 2018 toutes les conditions sont réunies, enneigement, températures : c’est le bon moment pour y aller.

Généralement je préfère monter dans la ligne à skier, histoire de bien repérer et analyser les conditions du moment.

Une fois n’est pas coutume, je déroge à cette règle. En effet cette sortie s’apprécie mieux en boucle, le plaisir avant tout ! La montée se passe par les pentes sud, à ne pas sous-estimer, qui débouchent au sommet de la Tête de Rasinière. Laquelle nous offre une vue époustouflante des Ecrins aux montagnes méditerranéennes.

Cette ligne directe et relativement exposée fut l’une de mes toutes premières pentes raides. Je me rappelle encore aujourd’hui le bruit de mon cœur dans ma poitrine et d’avoir eu le palpitant à deux mille à l’heure. J’étais impressionnée et impressionnable.

Je lance un caillou, il rebondit sur la surface encore dure du manteau neigeux.

Mais malgré une neige encore béton, il faut descendre car le bas du couloir passe déjà en mode printanier. Toujours compliqué de trouver le bon timing. Ma concentration est maximale dans cette partie supérieure, raide et exposée entre les barres rocheuses. Je ressens pleinement cette sensation de vide, loin au-dessus de la vallée de l’Ubaye. Plus bas la pente s’infléchit, la neige devient plus souple, les virages s’enchaînent. C’est beau mais ça engage un peu pour du 4.3 ! Ensuite le cheminement se fait dans le lit du torrent de Faucin, dans un cadre et une ambiance bucoliques.

Dans le couloir sud de la Chalanche -©Anaïs Barbeau

Chapeau de gendarme (2682m) – directe Sud, La Baouma, (5.1 E4, 1200D+) : Une ligne astucieuse qui se joue du relief

Le tracé – ©Anaïs Barbeau

En versant sud du célèbre Chapeau de Gendarme se dessine une ligne vertigineuse, en bordure des plus belles voies d’escalade de celui-ci.

Le 23 janvier 2020, nous décidons de parcourir cet itinéraire avec Julien et Romain. L’approche est rarement enneigée, et il est préférable de partir chaussures aux pieds et skis sur le dos. Ce jour là nous chaussons les skis au-dessus du hameau de Cloche. Une courte portion sur des pentes très faiblement inclinées permet de rejoindre la vire vertigineuse de la « Baouma ». Une sente quasiment à plat chemine sur celle-ci. Évolution avec les skis ou les crampons, c’est vous qui jugerez ! C’est la pépite de l’ascension et le dépaysement est garanti.

La vire de la Baouma, facile mais exposée, défend l’accès de la face suspendue – ©Anaïs Barbeau

S’en suit un cheminement varié (couloir, pente de neige, petite goulotte) permettant de finir sur l’arête au niveau de câbles, installés il y a quelques années par le régiment de chasseurs alpins.

Le voyage est magnifique sur cette arête enneigée et réserve une arrivée au sommet de toute beauté ! On y admire la face nord du Cimet et l’immense Cheval de Bois, dont la forme fait penser à un petit Annapurna.

Cette année là, je ne me sent pas capable de skier la ligne en sécurité. Mon bagage technique est trop moyen pour m’engager dans cette descente. Nous décidons alors de parcourir plus sereinement par la face NW avec un retour sur Uvernet. Ce n’est que l’hiver dernier, en janvier 2022, que je peux apprécier cet itinéraire, mon niveau technique à ski de pente raide ayant largement progressé, je n’ai plus de doute sur le fait de pouvoir skier ce dernier. Il faut parfois savoir attendre pour mieux apprécier!

Un final aérien – ©Anaïs Barbeau

En résumé, une ligne classe à l’ambiance sauvage au cœur de l’Ubaye !

 

Tête de Frustra (2926m) – face Sud-Est, Pure Line (5.1 E3, 1400D+) : Comme son nom l’indique !

Le tracé – ©Anaïs Barbeau

Depuis Jausiers et ses environs, cette ligne esthétique et bien visible raye tous les contreforts du massif du Parpaillon. Je la lorgne depuis un moment. Mais peu de risque d’y croiser qui que ce soit ! Il y a trop de lignes à parcourir dans cet univers sauvage, pour qui sait les voir, les imaginer, les dessiner.

Ici c’est le royaume du chamois.

C’est sur la route du col de la Bonnette que la ligne prend toute son ampleur. Un repérage me révèle que le bas de l’itinéraire est coupé par une petite barre rocheuse : il faudra certainement prévoir un peu d’escalade à la montée, et un déchaussage, voire un rappel, à la descente. Cette ligne nécessite un bon enneigement dans toutes les orientations car ici le soleil tape fort : il est difficile de trouver le bon créneau !

Le 13 janvier 2021, la face est belle et semble remplie à souhait. Les conditions de neige devraient être printanières dans ces contreforts ensoleillés. Heureusement ce jour-là, le soleil se contente de nous chauffer juste ce qu’il faut, homogénéisant ainsi le dégel du manteau neigeux sur l’ensemble de l’itinéraire.

Derniers hectomètres avant l’arête sommitale – ©Anaïs Barbeau

C’est à trois, avec Julien et Matt, que nous partons explorer ce bijou. L’approche en forêt, longue mais aisée, se termine par une traversée sous des barres pour récupérer le bas de la ligne. Celle-ci est composée d’un grand couloir principal menant jusqu’à l’arête de sortie. Cette année le couloir est défendu dans sa partie inférieure par la fameuse barrette rocheuse.

Deux options s’offrent à nous pour la franchir ce jour: soit par une escalade en glace (4+) ou par une section mixte à gauche en 3+. Nous optons pour le mixte.

La neige plutôt dure commence tout juste à décailler dans les parties les mieux exposées au soleil. La sortie sur l’arête sommitale se révèle débonnaire avec les crampons. Devant nous s’offrent le Mercantour, la Bonette, le Haut-Verdon, ainsi que toute l’Ubaye : nous vivons tous les trois là-haut une petite impression de haute-montagne !

Moquette à poil courts, et parfois un peu glacée ! – ©Anaïs Barbeau

Nous attaquons la descente dans la purée de pois : le bas de la pente et son inclinaison nous sont masqués, et réduisent la sensation de ligne de fuite naturelle. Après quelques virages sautés, nous trouvons une neige parfaite en mode moquette (à poils courts comme les chamois). La descente se déroule en fluidité, quoiqu’un peu physique, jusqu’à la petite barre, qui nous réserve une désescalade assez délicate. Quelques virages sautés plus loin, le tour est joué, nous sommes en bas !

Une nouvelle petite pépite comme seule l’Ubaye sait en produire !

Anais Barbeau masherbrum montagne alpinisme ubaye

Anaïs Barbeau, @Zigzaguons_avec_anais

 
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