loader image
5000km en solitaire à travers l’Australie

David est un voyageur au long cours. Par esprit d’aventure, il s’est mis en tête de traverser l’Australie d’est en ouest par ses propres moyens, faisant face aux immenses étendues désertiques, à la faune sauvage, et à l’épidémie covid qui frappe le pays en plein milieu de son périple. Il raconte sur le masherblog :

« Être assez naïf pour avoir des rêves, assez fou pour les croire possibles, assez obstiné pour les réaliser. ». Voici les trois qualités, ou les trois défauts, qui me poussent depuis maintenant quelques années à user mes chaussures sur les chemins de notre planète.

Un peu plus de 80 pays traversés sur les cinq continents, les ascensions du Kilimandjaro, du Mont Blanc ou du Pic du Midi d’Ossau dans mes Pyrénées natales… et le besoin d’un nouveau défi !

Direction les antipodes… l’Australie !

J’ai pour projet de traverser à pied l’île-continent depuis Byron Bay, le point le plus à l’est, jusqu’à Steep Point, celui le plus à l’ouest. Entre les deux, 5000 kilomètres en passant plein centre par les mythiques déserts de Simpson et de Gibson.

Dès le départ, leur terre rouge, leurs paysages à la beauté brute, sauvage et originelle alimentent mon imagination et m’aident à supporter les douloureuses ampoules des premiers jours de marche. Les deux premières semaines je progresse au rythme d’une quarantaine de kilomètres chaque jour. Je prends peu à peu les marques de l’expédition qui devrait durer environ six mois. Tous les soirs une âme généreuse m’offre l’hospitalité, le repas ou la possibilité de laver mon linge. Pour voyager léger je n’ai emporté que peu de vêtements. Deux t-shirts et un seul sweat… Un « Masherbrum » bien évidemment ! Mes amis Cyril puis Marie-Anne et mon épouse Jennifer me rejoindront plus loin sur la route pour m’apporter du change et me ravitailler dans les déserts. Ça… c’est simplement ce qui prévu…

Petite sieste dans l’une des interminables lignes droites de l’outback – ©David Debrincat

Fin mars j’arrive aux portes de l’Outback dans la petite ville de Roma. Voilà près de 700 kilomètres que je marche. La Covid touche de plus en plus de monde, le confinement général est instauré. Je me retrouve seul ici. Perdu. Je ne sais pas où aller quand je rencontre par hasard Georges. C’est la rencontre miracle ! Il est Français et vit ici depuis 1972. Nous discutons cinq minutes sur un bout de trottoir et il m’héberge pour les deux prochains mois… Le temps que la situation sanitaire s’améliore et que les restrictions soient levées.

J’ai perdu beaucoup trop de temps sur mes délais. Les frontières internationales sont fermées. Personne ne peut me rejoindre comme prévu. Je me retrouve seul à devoir affronter le désert. À pied c’est injouable. Hors de question de renoncer. Il me faut trouver une solution. C’est à vélo que je vais poursuivre mon expédition. Second départ !

Reprendre la route est un vrai soulagement. Petit à petit, au rythme de 100 kilomètres quotidien, je rattrape mon retard. Des vols de cacatoès accompagnent mon avancée. Les kangourous s’enfuient sur mon passage. Instants magiques ! Un serpent passe la nuit sous ma tente. Deux dingos hurlent à la lune. Frissons garantis !

Beware of kangaroos ! – ©David Debrincat

Une seconde vague de Covid touche la ville de Melbourne et c’est toute l’Australie qui se referme une nouvelle fois. Le passage entre les frontières régionales est interdit. J’entre illégalement dans le South Australia en me cachant dans le bush. Plus loin c’est le terrible désert du Nullarbor qui s’étend devant moi. 1400 kilomètres d’un décor identique jusqu’à l’horizon. Un paysage monotone de plaines infinies balayées par des vents violents et des tempêtes glaciales venues tout droit d’Antarctique. Nous sommes bien loin de l’image que l’on peut se faire du climat australien.

Le désert de Nullarbor – ©David Debrincat

En plein milieu, un barrage de police m’empêche d’entrer en Western Australia. C’est la dernière frontière à franchir. Il me reste plus de 2000 kilomètres à parcourir. Est-ce la fin de mon aventure ? Je ne peux pas me résoudre à l’accepter. Plus de deux années de préparation, des mois que je souffre sur ces routes et sur ces pistes. Je suis épuisé physiquement, mentalement, émotionnellement. Malgré tout j’ai encore assez de ressources pour ne pas abandonner. Pendant dix jours je campe dans l’hostilité de cet immense nulle part. Je négocie la permission de traverser. L’officier en place finit par craquer. Je peux y aller ! L’expédition est sauvée !

Bivouac et lumières magiques dans l’immensité australienne – ©David Debrincat

C’est reparti pour les trois dernières semaines jusqu’à Steep Point. L’arrivée devant le panneau indiquant le point le plus à l’ouest me submerge littéralement d’émotion. C’est le moment le plus fort de toute ma vie de voyageur. Le bonheur est tel qu’il efface instantanément toutes les souffrances des derniers mois. Seul et sans assistance j’ai traversé l’Australie sur près de 6000 kilomètres. Malgré les traces laissées par la transpiration, les pluies verglaçantes et les averses de grêle, mon sweat Masherbrum m’aura fidèlement accompagné d’un bout à l’autre du pays.

Steep Point : la fin de l’aventure – ©David Debrincat

De retour en France je me connecte sur masherbrum.fr, il m’en faut un neuf. En prévision d’une nouvelle aventure ?

David Debrincat a souffert toute son enfance d’un asthme aigu, qui l’empêchait tout effort physique. Il est auteur de différents récits d’aventures. Découvrez son histoire ici.