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Le dry-tooling… ou l’art de grimper sur le rocher avec piolets et crampons !

Pour ceux qui désespèrent de ne pas pouvoir aller en falaise pendant ces long mois glacés, et qui se languissent des beaux jours, l’équipe Masherbrum a une solution pour vous : et si vous testiez le dry-tooling ?

Un peu d’histoire…

Dans les années 80, après plus d’un siècle de pratiques alpines, de mutations de l’activité, et d’évolutions du matériel (inventions des pointes avant sur les crampons et des piolets tractions), on voit l’émergence de la cascade de glace en mode sportif.

La glace n’est plus vue comme un obstacle mais bien comme un véritable moyen de progression. Un nouveau terrain de jeu s’offre aux meilleurs alpinistes et grimpeurs du moment. Des terrains d’explorations et d’ouvertures pour des acteurs frénétiques et passionnés français tels que Godefroy Perroux, François Damilano, Patrick Gabarrou, Christophe Moulin, Thierry Renault, Guy Lacelle et bien d’autres…

Les secteurs comme le Fournel (Hautes-Alpes), l’Alpe d’Huez (Isère), la Grave (Hautes-Alpes), Ceillac (Hautes-Alpes), le bassin d’Argentière (Haute-Savoie), Sixt/Fer à Cheval (Haute-Savoie), le vallon du Diable (Isère), sont le théâtre d’une ruée vers cette matière gelée. Tout comme au-delà de l’hexagone : au Canada, en Norvège ou en Ecosse par exemple.

A la fin des années 90 c’en est trop ! La glace a connu son âge d’or et désormais les regards se tournent ailleurs. Il faut ouvrir le champ des possibles : on imagine des liaisons entre des bouts de glace suspendus dans de raides faces nord, et on cherche à s’entraîner en vallée pour réaliser ces nouveaux projets… le dry-tooling va naître !

Les techniques de dry-tooling permettent de lier des bouts de cascades séparés par du rocher – ©Johnathan Joly

La genèse et l’émergence du dry

Signifiant littéralement “utilisation d’outils sur terrain sec“, le dry-tooling du début des années 2000 reste une pratique confidentielle, marginale et alternative. Au fil des ans, cette activité d’intersaison enrichira la pratique de la cascade de glace et deviendra un véritable outil de préparation aux grandes lignes mixtes (glace/rocher), tel qu’il en existe par exemple à la tête de Gramusat dans la célèbre vallée de Freissinières (Hautes-Alpes).

Le dry-tooling pourrait ainsi se définir comme un savant mélange d’escalade (par la gestuelle de grimpe), d’artif (par le fait de tenir via des outils) et de cascade glace (par les outils utilisés : piolets tractions et crampons). Il permet de démocratiser les itinéraires mixtes en haute-montagne, et donc aux alpinistes chevronnés d’élever leur technicité pour ouvrir de nouvelles lignes en altitude.

Populaire dans le milieu montagnard, le “dry” est devenu une pratique à part entière, plus seulement au service des itinéraires mixtes en haute-montagne. Ainsi s’organisent des rassemblements et des compétitions de grimpeurs et grimpeuses de dry sur des falaises équipées proches des agglomérations, animés par une communauté active et passionnée.

Dry tooling sur la falaise de Quintal (74) avec un des tous premiers modèles Masherbrum – © Mathis Dumas avec Aurélien Vaissière

L’organisation de la pratique

De nombreux sites de couenne dédiés au dry-tooling ont vu le jour sur des falaises équipées, le plus souvent à la qualité du rocher médiocre non exploitable pour l’escalade sportive. Plus le rocher est médiocre, plus il offre de prises pour les engins, mais attention toutefois au dangers objectifs liés aux chutes de pierres !

Même si quelques falaises sont naturellement exploitables, elles sont le plus souvent aménagées pour la pratique du dry : perçage pour pouvoir y coincer les lames et mono-pointes, marquage à la craie ou à la peinture pour visualiser les « prises », agrémentées de volumes tel que des troncs de bois suspendus. On crée ainsi des mouvements imposés sur sites naturels impliquant une gestuelle spécifique au dry avec notamment le fameux mouvement Yaniro (passage d’une jambe par-dessus un bras dans les gros dévers), une technique réfutée par les membres du collectif français Dry Tooling Style, pronant un style plus épuré.

Les falaises convoitées pour le dry sont à minima verticales et très souvent déversantes, ce qui fait de ce sport une activité à forte sollicitation musculaire ! Si la pose des pieds n’en reste pas moins primordiale, le dry impose de gros efforts d la partie supérieure du corps et notamment la ceinture scapulaire : la pratique nécessite force, amplitude, coordination, fermeture de bras mais aussi un sérieux gainage.

Conseil : si vous souhaitez commencer le dry, veuillez à le faire de manière modérée pour vos premières séances. En effet l’intensité de l’effort demandé mettra à rude épreuve vos muscles s’ils ne sont pas préparés. Gare aux courbatures !

On ne peut évidemment pas parler de dry en France sans parler de l’association Dry Tolling Style, affiliée à la FFCAM, qui est certainement à l’origine de la démocratisation de cette pratique, avec comme fer de lance Jeff Mercier, Jonathan Joly et Gaëtan Raymond entre autres. Le DTS a tout simplement réussi à faire naître une véritable dynamique autour de la pratique, en organisant notamment une compétition à étapes (le DTS Tour) mais aussi en ouvrant de nombreux spots entièrement dédiés à la pratique. On note que les compétitions officielles et internationales de cascade de glace sont désormais composées de tracés entièrement dry, rendant ainsi le spectacle plus attrayant et plus spectaculaire pour le public.

Sur le terrain, une cotation propre apparaît, le M de “mixte” est remplacé par le D de “dry”, avec une échelle allant du D4 au D16/17.

Finalement le dry s’affranchit totalement de la présence de glace et s’assume ! Ainsi des itinéraires en mode grandes voies dry voient le jour comme dans les gorges de la Biaysse (Hautes-Alpes), au bassin d’Argentière (Haute-Savoie), ou encore au Ben Nevis (Ecosse).

Quelques falaises équipées pour le dry 

  • Contrepétrie à l’Argentière la Bessée (Hautes-Alpes)
  • Le toit des chèvres à Saint Martin de Queyrières (Hautes-Alpes)
  • Secteur Guides 06 à Gialorgues (Alpes-Maritimes)
  • L’Usine à Voreppe (Grenoble, site mondialement connu)
  • Le Zoo à Sallanches (Haute-Savoie)
  • Hell Cave à Aussois (Savoie)
  • Le Tilleul à La Grave (Hautes-Alpes)
  • Quintal (Haute-Savoie)…

Au secteur du Toit des Chèvres, dans les Hautes-Alpes – ©Johnathan Joly

Le matos du dry-tooleur ?

Tel que le grimpeur, l’équipement de base est constitué d’un casque, d’un harnais, de dégaines, d’une corde et d’un système d’assurage. A l’image du glaciériste, le dry-tooleur ajoute à sa panoplie des gants fins, des piolets tractions et des crampons mono-pointes.

Les piolets tractions sont souvent plus courbés qu’en glace. Leurs poignées très déportées offrent deux préhensions, une basse et une haute. Les crampons sont quant à eux en mode mono-pointe afin de valoriser les trous et les petites prises (ce qui n’est pas toujours le cas pour la glace, où beaucoup préfèrent les bi-pointes), et sont parfois même directement intégrés à la chaussure.

Conseil : pour votre pratique, vous pouvez utiliser de veilles lames et pointes avant de glace mais toujours en bon état et affûtées afin d’optimiser l’accroche et la tenue sur le support. En effet des outils « ronds » auront plus vite tendance à désancrer. Préférez vous équiper de lames spécifiques dry de votre fabriquant, plus plongeantes pour un meilleur griffage de la structure évitant ainsi les désencrages intempestifs et souvent dotées d’une crête de coq pour les prises inversées.

Vous avez désormais une vue d’ensemble du dry-tooling, alors en attendant le printemps et de remettre les chaussons, vêtus de votre première couche PROCLIMB2, n’hésitez pas à découvrir cette pratique qui vous procurera à coup sûr des sensations fortes et de bonnes séances de sport !

Un, deux, trois, dryez !