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Voies mythiques en face sud de la Meije

Parcourir des grandes voies d’escalade sur le sommet le plus mythique de l’Oisans ? C’est le rêve de bon nombre d’alpinistes… Le Mashercrew est allé défricher pour vous trois voies d’ampleur à la Meije, pour les grimpeurs en manque d’altitude !

 

Première étape : la voie Pierre-Allain (TD)

par Jean et Emma

Pierre Allain, le nom est déjà à lui seul une légende. On pense tout de suite à tout ce qu’on a dans les mains et qui a été inventé par ce gars-là : mousqueton en alliage, descendeur, chaussons, sacs en duvet et j’en passe. Ajoutez à ça une face mythique de 800m de hauteur, au caillou sculpté et solide à souhait… ça devrait être sympa !

Qu’est-ce qu’on attend finalement ? Ah oui les conditions peut-être : il faut que ça soit sec, mais pas trop non plus pour ne pas risquer les chutes de pierres. En effet quand la neige disparaît du glacier carré elle libère quantité de pierres posées, qui ne demandent qu’à rejoindre le pied de la face par gravité ! C’est d’ailleurs le principal risque de ces voies du Grand Pic.

La voie se résume en trois parties : le fauteuil et ses variantes d’accès, un bastion raide haut de 500m et la facette sommitale, petit triangle perché sortant à quasi 4000m.

La face sud du Grand Pic de la Meije, où se déroulent les voies Pierre-Allain et Mitchka – ©Jean Lefalher

 

Nous avons opté pour la variante d’accès de gauche ouverte par Christophe Moulin, moins exposée aux chutes de pierres et évitant la douche sous la cascade de l’attaque historique. Le départ n’est pas évident à trouver, il faut chercher la cascade de gauche puis remonter le névé 10m a gauche. Dans une zone raide on trouve un piton récent, à partir duquel on grimpe en tirant bien à droite pour trouver au bout de 30m environ un relais avec spit et piton.

La suite est évidente mais prudence en sortant sur le fauteuil : les cailloux peuvent pleuvoir. Il est sans doute préférable de se décorder pour la rapidité.

Le topo camptocamp est fort précis, et le schéma d’Arnaud Petit également, mais on est sur une face large de plusieurs centaines de mètres et les erreurs d’itinéraire sont faciles. Après avoir trouvé les fameuses « vires déversées » (comprenez des vires en dalles lisses), coupées au couteau, et qui penchent légèrement vers la gauche, nous voilà arrivés au crux de la voie : un couloir raide, mouillé et sableux, bouché par un dévers verdâtre. Nous avons choisi l’option historique : droit dedans ! Attention les pitons sont d’époque, et bien que fort nombreux ils subissent le gel en permanence…

Alpinisme en tout confort, avec l’Active Jacket PROCLIMB3 – ©Boris Pivaudran

 

Après un petit effort nous voilà aux vires du glacier carré. Il est possible de s’échapper ici par une traversée du glacier pour rejoindre la voie normale, mais attention a l’horaire, c’est plein sud et la neige chauffe fort !

La suite est simple, et pourtant beaucoup de cordées se perdent a cet endroit… sans doute parce qu’encore une fois on déroge à la sainte règle du « toujours au plus facile ». Cette fois ça n’est pas le cas en effet : repérez une vire en forme de triangle au-dessus de vous ,et visez son extrémité gauche. Oui oui ça penche, allez-y on vous dit ! En grosses chaussures ça grimpe sec… vingt dieux il n’a pas inventé les chaussons pour rien ce bon Pierre !

Ici commence le piège : des spits et des pitons partout… On vous donne l’astuce : clippez le premier spit en demandant pardon aux anciens pour cet affront, et tirez franchement à droite. Une fois dans les rails du dièdre en fissure oblique, difficile de se perdre… Bien qu’encore longue, la promenade se simplifie grandement, et puis le film est prenant, on ne va pas vous spoiler la fin !

Ça y est, vous êtes au sommet ? Et bien vous n’êtes pas encore arrivé… la mythique traversée des arêtes de la Meije vous attend : comptez 3-4h jusqu’au refuge de l’Aigle sans traîner, puis encore 3h pour rejoindre le fond de vallée, et sans doute autant pour le stop, si comme nous vous êtes jeunes et insouciants… Vous avez également l’option de redescendre par la voie normale, mais ça reste une descente complexe qu’il vaut mieux déjà connaître.

En matériel nous avons utilisé : un jeu de camalot jusqu’au 2, avec 0.5 et 1 en double. Stoppers et chaussons facultatifs. Attache 50m et un brin de rappel (type rad line). 1 piolet et crampons. Attention à se renseigner sur les conditions du contournement de la Dent Zsigmondy. Si le câble est sous la glace cela peut demander un deuxième piolet pour le leader.

Regard en arrière sur la traversée des arêtes de la Meije – ©Boris Pivaudran

Deuxième étape : la face sud du Doigt de Dieu (TD+)

par Boris et Julien

A 3973m, le Doigt de Dieu est le dernier sommet sur la traversée de la Meije. Il abrite lui aussi une voie historique, moins parcourue que la Pierre Allain mais de difficulté similaire. Son parcours est un chouia plus rapide, tout simplement car une fois au sommet il n’y a pas besoin de traverser toutes les arêtes, vu que nous sommes déjà à leur extrémité !

La première partie est la plus facile, techniquement parlant, mais la plus impressionnante. Il s’agit de faire une longue traversée sur des dalles pas très raides (III) mais souvent humides, et surtout avec très peu de possibilités de protection. Glissade interdite !

Le style de grimpe de la face sud du Doigt de Dieu reflète l’époque d’ouverture – ©Boris Pivaudran

Pour la suite, on remonte une longue fissure en V jusqu’à une vire neigeuse, au pied du dernier bastion. Avantage : l’itinéraire est plutôt évident ! L’itinéraire se remet ensuite à louvoyer (IV à V+) jusqu’au pied d’une dernière cheminée. De cet endroit, deux options s’offrent à vous. Les plus “warriors”, peuvent emprunter la sortie originale de Victor Chaud en 6b exposé (ouverte en 1951 avec le matériel d’époque…), sortant droit au sommet du Doigt de Dieu. C’est le choix le plus esthétique. L’autre option, la plus empruntée, est de sortir directement à la brèche. Pas si débonnaire que ça, du moins pour nous, car en empruntant la cheminée de gauche nous nous sommes retrouvés dans un terrain vertical mêlant glace, terre et fientes d’oiseaux. Le tout sur mauvaises protections…

En bref, une voie au caractère historique très marqué, pour ceux qui veulent marcher dans les traces des pionniers (et qui ont l’habitude de ce type de terrain !).

Descente du sommet du Doigt de Dieu, à la sortie de la voie – ©Boris Pivaudran

Troisième étape : la voie qui n’était pas prévue…

par Jean et Boris

Souvent en montagne, le plan ne se déroule pas comme prévu. Le plan A se transforme en plan B, et le plan B en plan C. Il faut savoir improviser !

Avec Jean, nous avons la ferme intention de gravir Mitchka, une voie mythique de la face sud, la plus dure. Trouver le bon créneau est un art délicat : outre une météo favorable, il faut que le glacier Carré soit encore en neige pour sceller les nombreuses pierres qui ne demandent qu’à débarouler, mais qu’il ne coule pas trop pour ne pas mouiller les raides longueurs de la voie en dessous. Des conditions favorables qui ne se retrouvent qu’une poignée de jours dans l’année.

Ce jour-là, nous pensons tenir notre créneau. La Meije a certes connu des petites chutes de neige ces derniers jours, mais avec 48h de soleil et vent, la face sud devrait avoir eu le temps de sécher. La montée au légendaire refuge du Promontoire perché sur son éperon granitique, et dont nous sommes fiers d’être partenaires avec Masherbrum, ne nous permet pas de statuer sur la présence ou non d’eau dans la voie. Le glacier Carré est encore tout en neige, pourtant la veille une cordée s’est enfuie en courant devant une salve de pierres. Il faudra aller voir au pied.

Le refuge du Promontoire est idéalement placé pour rayonner sur quantité d’itinéraires d’alpinisme – ©Masherbrum

 

Après un bon repas concocté par Sandrine et son aide-gardienne et une courte nuit, nous partons à la frontale pour arriver au pied de Mitchka dans les premières lueurs du jour. Aucune chute de pierre, mais surprise ! Là haut, de grandes coulées de glace scintillent : elles se sont formées pendant la nuit et recouvrent des portions clés de la voie. Le constat est sans appel, Mitchka ne veut pas de nous.

Nous allons alors au pied de notre plan B, la voie “Les grimpeurs se cachent pour ouvrir”. En 7a max et plus à droite dans la face sud, on l’avait identifiée comme notre “valeur sûre”. Au pied, même constat : les premières longueurs ruissèlent. Rien à faire.

Retour donc à la case refuge, pour un deuxième petit-déjeuner (ça va, il n’est que 7h du matin). Nous prenons le temps de faire quelques photos de topo avant de repartir en direction de la face ouest. Prendre un bide en face sud nous a fait horreur, alors cette voie de 600m nommée “L’horreur du bide” est toute trouvée pour nous. L’autre raison (la principale) est qu’elle est longue, sûrement sèche, et sort à un sommet.

“L’horreur du bide” emprunte de belles sections de granit orangé, un plaisir à grimper ! – ©Boris Pivaudran

 

Et quel choix ! Ces 20 longueurs d’escalade se déroulent sur un granit irréprochable, avec des sections en rocher sculpté rappelant les plus beaux passages de l’aiguille Dibona (pour les connaisseurs). On grimpe l’esprit léger sur cette voie toute équipée qui déroule dans le 6a/b, avec deux longueurs de 6c. Les quelques zones verglacées ne sont pas trop gênantes, seul un fort vent froid vient entraver notre enthousiasme. Heureusement, au fur et à mesure que nous persévérons, celui-ci s’atténue. Il devient négligeable une fois au sommet, que nous atteignons après 5h50 d’escalade.

Nous pouvons observer au fil de notre ascension les plaques de glace se détachant sous l’oeuvre du soleil en face sud et s’écrasant en mille morceaux plus bas. Y’a pas à dire, on est mieux ici…

Jean a gardé les baskets dans les 6b… trop facile pour lui ! – ©Boris Pivaudran

 

En bref une voie de toute beauté à recommander chaleureusement !

Pour ceux qui veulent découvrir la Meije par des voies plus classiques d’alpinisme, nous vous conseillons ces articles :

Traversée des arêtes de la Meije

Traversée Pavé – Meije Orientale

-5°C le matin, grosse fournaise l’après-midi au pied de la face ouest ! – ©Boris Pivaudran

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